On a assisté ce jeudi à une flambée des prix de l’essence qui bat des records.
Cette nouvelle hausse est au cœur des préoccupations des consommateurs lorsque les panneaux
d’affichage annoncent que l’essence coûte désormais 4, 5 ou même plus de 6 dollars le
gallon dans certains endroits.
Avec des prix qui atteignent des sommets, les Américains ressentent immédiatement
l’impact à la pompe. Mais la hausse des prix du carburant est aussi un vent contraire pour
l’économie au sens large, au-delà du fait que les consommateurs ont moins d’argent à
dépenser. L’augmentation du coût du carburant, en particulier du diesel, signifie que tout ce
qui est transporté par camion, train ou bateau est affecté.
Les coûts de l’énergie contribuent largement aux chiffres de l’inflation qui atteignent des
sommets depuis des décennies, car les prix de toutes sortes de biens et de services
augmentent.
Pourquoi les prix du carburant sont-ils si élevés ?
La flambée des prix de l’essence est due, en grande partie, à la hausse des prix du pétrole.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie est le dernier catalyseur en date à faire grimper le prix,
mais les prix étaient déjà en mouvement avant la guerre.
Avant même le Covid, les producteurs d’énergie ont réduit les investissements et les projets
moins rentables sous la pression des prix bas et des actionnaires institutionnels exigeant des
rendements plus élevés.
Puis les producteurs ont encore réduit leur production pendant la pandémie, lorsque les
besoins en produits pétroliers se sont effondrés. Les gens n’allaient nulle part et les
entreprises étaient fermées, de sorte que les besoins en carburant étaient bien moindres.
Depuis, les économies se sont rouvertes, l’industrie manufacturière a redémarré et les gens
reprennent la route et l’avion. Cela a entraîné une hausse de la demande et un marché
pétrolier de plus en plus tendu à partir de l’automne dernier. En novembre, le président Joe
Biden a puisé dans la réserve stratégique de pétrole dans un effort coordonné avec d’autres
pays, dont l’Inde et le Japon, afin de calmer les prix. Mais le soulagement a été de courte
durée.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie à la fin du mois de février a fait vaciller un marché de
l’énergie déjà fragile.
Le 7 mars, le pétrole américain a atteint son plus haut niveau depuis 2008, dépassant les
130 dollars le baril. La Russie est le plus grand exportateur de pétrole et de produits
pétroliers au monde, et l’Union européenne dépend d’elle pour le gaz naturel. Alors que les
États-Unis, le Canada et d’autres pays ont interdit les importations de pétrole russe peu
après l’invasion, l’Union européenne a déclaré qu’elle ne pouvait pas le faire sans
conséquences néfastes.
Aujourd’hui, l’Union européenne tente d’élaborer un sixième cycle de sanctions contre la
Russie, qui inclut le pétrole, mais la Hongrie fait partie de ceux qui s’y opposent.
Le pétrole a depuis reculé par rapport aux sommets atteints après l’invasion, mais reste
fermement au-dessus de 100 dollars. Pour replacer ce chiffre dans son contexte, au début
de 2022, un baril de brut coûtait 75 dollars, alors qu’à la même époque l’année dernière, les
prix étaient plus proches de 63 dollars.
La hausse rapide du prix du pétrole et donc du carburant donne du fil à retordre à
l’administration Biden, qui a appelé les producteurs à pomper davantage. Les compagnies
pétrolières sont réticentes à forer après s’être engagées auprès des actionnaires à faire
preuve de discipline en matière de capital, et les dirigeants affirment que même si elles
voulaient pomper davantage, elles ne le peuvent tout simplement pas. Elles sont
confrontées aux mêmes problèmes que ceux qui touchent l’ensemble de l’économie,
notamment la pénurie de main-d’œuvre et la hausse des prix des pièces et des matières
premières, comme le sable, qui est essentiel à la production par fracturation.
Le prix du pétrole représente plus de la moitié du coût final d’un gallon d’essence, mais ce
n’est pas le seul facteur. Les taxes, les coûts de distribution et de raffinage influencent
également les prix.
La capacité de raffinage limitée commence à jouer un rôle plus important. Le raffinage est
l’étape clé qui transforme le pétrole brut en produits pétroliers que les consommateurs et
les entreprises utilisent quotidiennement. La quantité de pétrole que les raffineurs peuvent
traiter a diminué depuis la pandémie, en particulier dans le Nord-Est.
Parallèlement, les exportations de produits pétroliers en provenance de Russie sont
frappées par des sanctions, ce qui amène l’Europe à chercher d’autres fournisseurs. Les
raffineurs fonctionnent presque à pleine capacité et les marges de craquage – la différenceentre le coût du pétrole pour les raffineurs et le prix auquel ils vendent leurs produits – pour
le diesel atteignent maintenant des niveaux records.
Tous ces éléments poussent les prix de l’essence à la hausse. La moyenne nationale pour un
gallon d’essence a atteint un niveau record de 4,589 $ jeudi, selon l’AAA, contre 3,043 $ à la
même époque l’année dernière. Les chiffres ne sont pas ajustés en fonction de l’inflation.
Pour la première fois dans l’histoire de l’automobile, le prix moyen du gallon dépasse les 4
dollars dans tous les États, tandis qu’en Californie, il dépasse les 6 dollars.
Les prix du diesel augmentent également de façon vertigineuse. Les prix de détail du diesel
ont atteint un niveau record de 5,577 dollars le gallon mercredi, soit une hausse de 76 % par
rapport à l’année dernière.
Selon Yardeni Research, les ménages dépensent désormais 5 000 dollars par an en essence,
contre 2 800 dollars il y a un an.
Comment les prix du carburant affectent-ils les entreprises ?
La destruction de la demande, c’est-à-dire le niveau auquel des prix élevés influencent le
comportement des consommateurs, due à la flambée des prix du carburant ne s’est peut-
être pas encore produite à grande échelle, mais les répercussions se font sentir dans toute
l’économie. Des prix plus élevés à la pompe signifient non seulement moins d’argent dans
les poches des consommateurs, mais aussi une augmentation des coûts pour les
entreprises, dont une partie ou la totalité sera ensuite répercutée sur les consommateurs.
Target est l’une des entreprises aux prises avec des coûts plus élevés. Les actions de la
chaîne de magasins se sont effondrées de 25 % mercredi – la pire journée depuis 1987 –
après la publication des résultats de Target, qui a mis en garde contre les pressions
inflationnistes.
“Nous n’avions pas prévu les changements rapides que nous avons observés au cours des 60
derniers jours. Nous n’avions pas prévu que les coûts de transport et de fret monteraient en
flèche comme ils l’ont fait alors que les prix des carburants ont atteint des sommets
historiques”, a déclaré Brian Cornell, PDG de Target, lors de la conférence téléphonique sur
les résultats trimestriels de la société.
Il a déclaré à CNBC que la hausse des coûts du carburant et du diesel représentera un coût
supplémentaire d’environ 1 milliard de dollars au cours de l’exercice financier et une
“augmentation importante que [Target] n’avait pas prévue”.
Les dirigeants de Walmart ont fait des commentaires similaires. “[L]es coûts du carburant se
sont accélérés au cours du trimestre plus rapidement que nous n’avons pu les répercuter, ce
qui a créé un problème de timing”, a déclaré mardi Doug McMillon, président-directeur
général de Walmart, lors de la conférence téléphonique sur les résultats du premier
trimestre du détaillant. “Le prix du carburant a été supérieur de plus de 160 millions dedollars à nos prévisions pour le trimestre aux États-Unis.”
McMillon a ajouté qu’au cours du trimestre, l’entreprise a fait “des progrès pour adapter les prix à l’augmentation des coûts”.
″Le coût de l’expédition d’un conteneur outre-mer a plus que doublé par rapport aux taux
pré-pandémie, et le coût du carburant est environ une fois et demie plus élevé qu’il y a
même un an “, a noté Amazon lors de sa mise à jour trimestrielle.
L’industrie du transport aérien ressent également l’impact de la flambée des prix du
kérosène, en particulier sur la côte Est.
Southwest Airlines a noté qu’elle avait constaté une “hausse significative des prix du
carburéacteur sur le marché” au cours du dernier trimestre, tandis que le PDG de United
Airlines, Scott Kirby, a déclaré à CNBC que si les prix actuels du carburéacteur se
maintiennent, cela coûtera à la compagnie aérienne 10 milliards de dollars de plus qu’en
2019.
Pour replacer cette flambée dans son contexte, un transporteur devra désormais payer près
de 1 000 dollars de plus que l’année dernière en frais de carburant pour acheminer une
cargaison de Los Angeles à la côte Est.
C’est une véritable pression sur les coûts inflationnistes.
Quel avenir pour le prix de l’essence ? Quel impact sur le marché ?
Pour ce qui est de l’avenir, les experts affirment que la destruction de la demande pourrait
être le seul moyen d’endiguer la hausse des prix de l’essence.
M. Kilduff a souligné deux facteurs clés qui stimulent la demande malgré les prix élevés : la
demande refoulée après la pandémie et un marché du travail solide, ce qui signifie que les
gens paieront ce qu’il faut pour se rendre à leur travail.
Andy Lipow, président de Lipow Oil Associates, a déclaré qu’il pense que la moyenne
nationale culminera entre 4,60 et 4,65 dollars.
Sur le marché, Il a noté que la vente des actions a entraîné les contrats à terme sur l’essence
à la baisse, ce qui pourrait donner un répit temporaire aux consommateurs à la pompe.
Mais le pétrole est également utilisé dans de nombreux produits de consommation,
notamment le plastique, ce qui signifie que même si les prix de l’essence diminuent
temporairement, les coûts dans l’ensemble de l’économie pourraient rester élevés si le
pétrole reste élevé.
Certains analystes prévoient que les Américains pourraient utiliser jusqu’à 9,7 millions de
barils d’essence par jour cet été, ce qui, en août, pourrait laisser les États-Unis avec le
niveau de stock le plus bas depuis les années 1950. Cela pourrait faire grimper les prix de 37
%, pour atteindre un prix moyen de 6,20 $ le gallon.
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